LAPSSET : LE CORRIDOR INDUSTRIEL ET LOGISTIQUE QUI REDESSINE L’EST AFRICAIN

Le LAPSSET Corridor (Lamu Port–South Sudan–Ethiopia Transport Corridor) est le plus grand projet d’infrastructure jamais lancé par le Kenya et l’un des plus ambitieux d’Afrique. Conçu pour transformer les échanges commerciaux et l’intégration régionale, ce méga-projet vise à relier le port de Lamu, sur l’océan Indien, aux zones enclavées de l’intérieur du continent, notamment au Soudan du Sud et à l’Éthiopie.

Le projet comprend un ensemble d’infrastructures intégrées : un port en eau profonde à Lamu, des oléoducs pour transporter le pétrole du Soudan du Sud et du nord du Kenya, une voie ferrée standard reliant Lamu à Isiolo, puis aux frontières éthiopienne et sud-soudanaise, des autoroutes modernes, ainsi que des zones économiques spéciales et des aéroports. L’ensemble du corridor devrait s’étendre sur plus de 2 000 kilomètres de voies de communication.

L’objectif principal de LAPSSET est double. D’une part, il permet au Kenya de diversifier ses infrastructures portuaires en réduisant la dépendance au port de Mombasa, aujourd’hui saturé. D’autre part, il offre une ouverture maritime aux pays voisins dépourvus de littoral, comme l’Éthiopie et le Soudan du Sud, facilitant leurs exportations et importations. LAPSSET ambitionne ainsi de devenir un moteur de croissance pour la région, en stimulant le commerce, l’investissement et l’industrialisation.

Le coût total du projet est évalué à plus de 25 milliards de dollars. Son financement repose sur un montage complexe mêlant ressources publiques kenyanes, partenariats public-privé et investissements étrangers, notamment chinois et émiratis.

Depuis le lancement officiel du projet en 2012, plusieurs composantes ont déjà vu le jour. Le port de Lamu a accueilli son premier navire commercial en 2021. Des sections routières ont été construites, et les travaux ferroviaires sont en cours, bien qu’ils aient connu des retards. Le projet avance par étapes, confronté à des défis financiers, logistiques et sécuritaires, en particulier dans les zones frontalières sensibles.

LAPSSET suscite aussi des débats sur son impact environnemental et social : la construction du port et des infrastructures menace certains écosystèmes côtiers sensibles et affecte les communautés locales (pêcheurs, éleveurs) qui redoutent d’être marginalisées. Le projet est donc un test pour la capacité des États de la région à concilier développement économique, inclusion sociale et préservation de l’environnement.

S’il est mené à bien, LAPSSET pourrait changer durablement la carte économique de l’Afrique de l’Est, faisant du Kenya un carrefour logistique régional et ouvrant de nouveaux horizons pour ses voisins.